Aujourd’hui, la “copie” est définie dans le Larousse comme “la reproduction d'une œuvre d'art”. Pourtant, la copie désigne des œuvres et des pratiques de nature très diverses tout au long de l’histoire de l’art. Différente du faux, la copie a une identité propre.
Une pratique artistique importante dans l’Histoire de l’art
La notion de copie en art n’est pas toujours évidente, car elle est souvent confondue avec celles de “reproduction” ou même de “faux”. Elle est aussi dévalorisée au profit de l’originalité. En effet, la copie ne vise pas à produire une œuvre originale, mais à reproduire, imiter, approcher l’œuvre d’un autre artiste, ou encore prendre pour modèle.
Ce procédé artistique est pourtant ancien : on le pratique bien avant le XIXe siècle. Pendant longtemps, la copie était au cœur du processus artistique. On considérait qu’un “bon” artiste devait s’inspirer des autres pour créer.
A partir du XVIIe siècle en France, avec l’apparition de l’Académie de peinture et de sculpture, les jeunes artistes doivent copier les “maîtres” au cours de leur apprentissage. L'artiste Eugène Delacroix expliquait sur la copie :
« Ça a été l'éducation de presque tous les grands maîtres. On apprenait d'abord la manière de son maître [...]. On copiait ensuite tout ce qui tombait sous la main d’œuvres d'artistes contemporains ou antérieurs. » (1).
Les élèves devaient s’approprier la technique et les qualités des “maîtres”. La copie a tout d’abord une vertu pédagogique.
Au XIXe siècle, la demande de copie est bien plus importante. La copie est également un moyen de diffuser une œuvre de “référence”. L'État commande alors des copies d’œuvres pour décorer les bâtiments officiels et les églises. Des artistes pouvaient donc faire carrière dans la copie.
Ainsi, même les artistes les plus célèbres ont pratiqué la copie. Eugène Delacroix en est un bon exemple. Le peintre de La Liberté guidant le peuple fréquentait le musée du Louvre, et copia (fig. 1) à plusieurs reprises des œuvres de Pierre Paul Rubens (fig. 2), peintre flamand du XVIIe siècle.
Comment définir la copie ?
Certaines définitions du XIXe siècle sont plus précises à ce propos. En 1884, Jules Adeline explique qu’un copiste est “un artiste qui copie, reproduit soit à titre d’étude personnelle soit dans tous autres buts avoués, l’œuvre d’un autre artiste”. Selon lui, le copiste ne doit pas être confondu avec le copieur qui “copie ou reproduit sans l’avouer l’œuvre d’autres artistes”(2).
On retrouve alors la notion de reproduction et surtout une distinction essentielle. Le ou la copiste “avoue” qu’il s’agit d’une copie, alors que le copieur reproduit “sans l’avouer”. Cette distinction introduit la différence entre la copie et le faux.
Copie VS faux
Aujourd’hui, la copie est parfois confondue avec la contrefaçon ou le faux. Comment les distinguer ?
La copie ne se prétend pas être un original. Ce qui compte c’est l'intentionnalité. Le ou la copiste n’a jamais voulu que son œuvre soit considérée comme celle d’un autre. A l’inverse, un faux prétend être un original. Il arrive cependant que des copies deviennent des faux, car elles sont mal attribuées.
Par ailleurs, les faussaires ne copient pas souvent à l’identique une œuvre, mais ils en créent une nouvelle en reprenant des éléments de plusieurs œuvres, tel que l’artiste aurait pu le faire. Son but est de vendre le faux comme s'il s’agissait d’une œuvre originale.
La copie : une reproduction fidèle ?
Enfin, la copie n’est pas une simple reproduction. Elle ne peut pas être le calque identique de l’œuvre originale: pour des raisons techniques (changement de format, de technique…) et car le ou la copiste pose un regard singulier sur l’œuvre qu’il copie. Finalement, le copiste interprète l’œuvre, même s’il souhaite rester le plus fidèle possible. Ainsi, copier, c’est déjà créer.
Par exemple, le ou la copiste peut choisir de diminuer le format pour faire une miniature. C'est le cas de Clémentine Pépin qui réalise une copie (fig. 3) d'un tableau religieux de Raphaël (fig. 4), dans un format six fois plus petit.
A l’inverse, parfois le ou la copiste interprète délibérément l’œuvre originale, ou ne choisit de représenter qu’une partie : la copie est aussi un espace de création artistique.
Ainsi, la copie a une identité différente de l’œuvre originale, que nous pouvons résumer de la façon suivante :
Carte d’identité de la copie
Auteur : Le ou la copiste, d’après un autre artiste
Ainsi, si le ou la copiste peut reproduire la signature de l’artiste original, il peut aussi apposer la sienne.
Choix de l’œuvre à copier : selon les goûts
Le choix de copier certaines œuvres informe sur le goût des copistes, mais aussi sur le goût des commanditaires de copie ou d’une période. Cela permet de voir ce qui était jugé important de copier à une époque.
Dimensions : variées
D’un grand format à une miniature, la copie peut prendre des formes bien différentes.
Techniques : diverses
Le ou la copiste peut choisir de copier une huile sur toile avec les mêmes matériaux ou avec d’autres (peinture sur porcelaine, aquarelle, dessin, gravure, etc).
Difficulté : pas si facile !
Le ou la copiste montre ses qualités techniques, son œil et sa capacité d’adaptation.
De nombreuses copies subsistent dans les collections de musées, de monuments et d'institutions. Elles sont des témoignages importants de cette pratique artistique traversant l'histoire et prenant une variété de forme. Il n'est pas impossible que vous les croisiez au cours d'une visite, tout comme les copistes qui travaillent encore dans les couloirs du musée du Louvre.
Ludivine Fortier
Notes
(1) DELACROIX Eugène, Dictionnaire des Beaux-arts, in Journal 1822-1863, Paris, André Joubin, 1980, p.616 “13 janvier 1857”.
(2) ADELINE Jules, Lexique des termes d’art, Paris, A. Quentin, 1889, p. 119.
Sources et bibliographie
BAZIN Germain, « ART (L'art et son objet) - Le faux en art », Encyclopædia Universalis, [en ligne : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/art-l-art-et-son-objet-le-faux-en-art/], consulté le 12 novembre 2019.
STRZALKOWSKI Clémentine, Femmes copistes et commande publique (1848 - 1914). Des artistes professionnelles au service de l'Etat, Mémoire d'étude en Histoire de l'art, sous la direction de MORIN LOUTREL Isabelle, 2019.
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